Les rivalités européennes pour le contrôle de la ville, porte entrouverte sur le Maroc, démarrent en cette fin de XIXe
siècle. La France, l'Espagne, le Royaume-Uni, l'Allemagne multiplient les missions diplomatiques et commerciales pour
placer leurs pions mettant la ville au centre des rivalités internationales. En 1880, la convention de Madrid tente de
définir les relations entre les grandes puissances au sujet du Maroc. Poussé par le chancelier Bulow qui entend rappeler
de façon, sensationnelle, que l'Allemagne ne se laissera pas mettre à l'écart et que la France ne peut modifier l'état
politique du Maroc sans l'autorisation d'une nouvelle Conférence internationale, Guillaume Il débarque le 31 mars 1905 du
Yacht impérial Hohenzollern à Tanger pour quelques heures et dénonce, après un entretien avec l'oncle du sultan, les
visées françaises et espagnoles sur le Maroc, ce qui provoque une crise diplomatique. En 1906, la conférence d'Algésiras
redéfinit les positions de chacun en Afrique reconnaissant l'indépendance du sultan et affirmant l'égalité des signataires
dans le domaine économique. En 1923 les négociations aboutirent à en faire une zone internationale affranchie de droits de
douanes. Le 24 juillet 1925, le statut définitif de Tanger est signé par le Royaume-Uni, l'Espagne, la Belgique, la
Hollande, les états-Unis, le Portugal, l’Union soviétique et la France, auxquels se joindra l’Italie un peu plus tard.
La ville possède désormais son autonomie financière. On la dote d'une administration internationale, en particulier d'une
assemblée législative, composée de trente fonctionnaires internationaux désignés par leurs consuls respectifs et de neuf
marocains. L'époque du "Statut international" est celle du plus grand rayonnement international de Tanger, tant dans le
domaine culturel que dans celui des affaires, favorisé par les facilités offertes à la contrebande, à l'espionnage et à la
contrefaçon.
En juin 1940, après la défaite française, les troupes nationalistes espagnoles occupent Tanger et permettent, en mars 1941,
l'installation du consulat allemand à la mendoubia (résidence du Mendoub) où flotte le drapeau nazi. En mars 1944,
l'Espagne fait partir le consulat allemand de la mendoubia avant de retirer, le 9 octobre 1945, ses troupes de Tanger qui
retrouvera son statut international. Entre 1939 et 1950, Tanger a vu sa population tripler et atteindre plus de 150 000
habitants.
Le 10 avril 1947, le sultan Mohammed V, accompagné du prince héritier Moulay Hassan (futur Hassan II), prononce à Tanger
le premier discours qui fait référence à un Maroc unifié et indépendant rattaché à la nation arabe. En 1956, avec
l'indépendance du Maroc, la conférence de Fedala (8 au 29 octobre) rend Tanger au Maroc. Une charte royale maintient la
liberté de change et de commerce jusqu’en 1960, année où le gouvernement marocain abolit les avantages fiscaux et Tanger se
retrouve avec un statut identique à celui des autres villes du royaume. Afin d'éviter une fuite importante des capitaux,
le port de Tanger est doté d'une zone franche.
Le retour à la souveraineté marocaine voit le déclin progressif de l'influence politique et culturelle de Tanger. Néanmoins,
après plusieurs années d'abandon de la part du gouvernement central, la ville de Tanger connaît depuis une dizaine d'années
un développement spectaculaire, dont il est cependant à craindre qu'il ne dénature profondément son paysage urbain, et
profite davantage aux intérêts des compagnies off-shore qu'à ceux des populations de la région . Tanger est aujourd'hui
habitée par une population essentiellement issue des Jebala.